“Un trait peut en cacher un autre”
Jo Brouillon
« De la barbarie au jardin des langues »
Non seulement, les tableaux de Jo Brouillon se regardent, mais ils se lisent. Derrière le fourmillement des traits, des images, des références, et l’apparente confusion des compositions, une volonté de mise en ordre se révèle. Ainsi à priori, tout est jeté pour que le regard fasse le tri et qu’ensuite se reconstruise à posteriori une méthode génératrice de sens, ce, dans la plus pure tradition Kantienne, implacable dans son processus logique.
Il nous reste à découvrir en raison de quel grain de sable, cette machine à penser, huilée par les soins du mécanicien brouillon, nous entraîne dans les territoires plus hasardeux du raisonnement en escalier. Serions-nous projetés, par l’omission d’une marche, dans les visions poétiques de Baudelaire quand il évoque la qualité du « dessin barbare* » consistant pour un peintre à cerner la mémoire par un trait synthétique et abréviateur, ou sommes-nous noyés dans les eaux troubles de l’origine du langage élaboré par le prince des penseurs Jean-Pierre Brisset prétendant que : « l’origine universelle des langues se concentrait dans le Coa-Coa des grenouilles. »**
Méditons avec rigueur cet extrait du lexique volé en lisant au hasard des tableaux de l’artiste, des mots qui résonnent comme une invitation à la compréhension souriante : « Avant-gardiste, transformer la grimace, ni paix ni temps, en douce extase, ritorno di fiamma, pollen mystic, Danae et la pluie d’or, abracadabra chéri bibi, le tyran au zoo russe, to bebop or not…
Les mots une fois assimilés, traits et doubles traits nous excitent pour trouver une solution à ce rébus poétique.
Jean-Pierre PLUNDR
* Charles Baudelaire – Écrits sur l’Art – L’art mnémonique
** Jean-Pierre Brisset – La grammaire logique